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DSK et Eva Joly, les messies de la gauche croupion

28/08/2010 7 commentaires

Pour choisir ses leaders, la gauche mise sur les sondages. Plutôt que sur les idées.

Après le show Eva Joly chez les écolos, l’énième feuilleton DSK chez les socialos, Lors de l’université du PS, le nom du boss du FMI était sur toutes les lèvres. Ses partisans préparent déjà sa candidature en 2012. Martine Aubry et Laurent Fabius pourraient se rallier à lui. Certains, comme Benoît Hamon, porte-parole du PS, toussotent et Ségolène Royal est toujours là mais qu’importe. DSK a les médias avec lui. Il a aussi ses réseaux d’affaires, son statut de chef du FMI, son passé de ministre de Jospin et de cacique du parti.

C’est bien là le drame. Les militants PS ne sont tous dupes mais, au vu de son CV, DSK est une impasse. Le PS a besoin de renouveau et pas d’un pilier du jospino-rocadisme. Le PS doit reconquérir les milieux populaires et ruraux et ne pas se fier à un « social-démocrate », mot poli pour parler de la gauche molle. Mais la vie politique s’est personnalisée, le fond compte autant voire moins que la forme. DSK fait de bons scores dans les sondages, Eva Joly est sympa et honnête. Peu importe leurs idées, ils passent bien au JT de TF1.

Dérive sarkozienne

Une vision perverse de la vie politique apparaît alors. Celle d’une lutte de personnes déconnectée du réel. Les chiffres que l’on scrute ne sont plus ceux du chômage mais ceux de l’IFOP. Sarkozy est vu comme affaibli non pas à cause de la crise mais parce que DSK va lui mettre la pâtée  en 2012 selon la Sofres. Les sondages sont devenus une arme. Les politiques aiment les critiquer quand ils sont mauvais mais les brandissent quand ça les arrange. Au fond, le problème n’est pas la fiabilité des sondages, c’est leur instrumentalisation.

En cela, la folie DSK ou Eva Joly montrent la dérive intellectuelle du PS et des écolos. Ils incarnent une gauche sans idées ni audace, qui ne cherche plus à changer la société mais à s’y adapter. Une gauche qui ne veut plus conquérir le peuple mais le flatter. La menace finale, c’est une dérive à la Sarkozy. Sur la forme du moins. Car le chef de l’Etat incarne, à l’extrême, un système politicien sans idées, soumis à l’opinion, drogué aux sondages et dont le seul fondement est l’allégeance à un leader. Va chercher l’alternance avec ça.

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Les médias regardent le peuple… mais de haut

27/06/2010 Commentaires fermés

Les journalistes sont une élite. Ils n’ont que de vieilles ficelles pour se rapprocher de leur public.

« Ça intéresse les gens ». Une remarque maintes fois entendue dans la bouche des journalistes. L’argument qui tue pour défendre un sujet à deux balles et pourtant régulièrement à la une des mass-médias : les méthodes de régimes, les palmarès des lycées/hôpitaux, le maillot de foot/string/bermuda à l’école… Une pseudo-proximité qu’on oppose à la presse vue comme « chiante » ou pire « intello ». Ici, on donne au peuple ce qu’il demande

Face aux critiques, on dira que ce type de sujets fait monter les ventes. On brandira des chiffres. Là est le problème. Le public n’est plus qu’une statistique. Le lecteur n’est plus un citoyen cherchant à comprendre le monde mais une cible publicitaire. Quand la presse parle au peuple, elle ne cherche pas à l’élever mais à le rabaisser. Elle ne le voit que comme un crétin qui ne s’intéresse qu’à des choses crétines. C’est facile et pas cher.

Rabaisser le peuple

Au fond, c’est une marque de mépris. Parler des tourments de la finance ou de la mondialisation, « c’est trop compliqué, les gens vont pas comprendre ». On pourrait expliquer, être pédagogue, mais ça demande du temps et de la compétence. Tout ce que la presse n’a pas. Alors on ressort des vielles recettes. On évite de prendre des risques, quitte à prendre les gens pour des demeurés. La presse sacrifie sa mission éducative sur l’autel commercial.

Cela marque la coupure entre le peuple et les médias.  Les journalistes sont une élite sociale et culturelle. Ils ne savent plus ressentir ce qui préoccupe les gens. Alors ils se basent sur leurs impératifs publicitaires.  Ils n’ont plus de valeurs  à défendre mais un public à racoler. Comme les énarques qui ne connaissent l’électorat qu’à travers les sondages. Faire simple pour vendre au plus grand nombre, cela a un nom : la démagogie. La dernière valeur de la presse.

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DSK est un Dieu, les médias sont ses prophètes

29/05/2010 2 commentaires

Les mass-médias plébiscitent DSK. Quitte à supprimer tout sens critique.

La folie DSK. A deux ans de l’élection présidentielle, le patron du FMI est déjà en campagne.  Ou plus exactement, les médias le voient en campagne. C’est récurrent, les journalistes politiques ont besoin de stars pour assouvir leurs pulsions  pré-pubères. Chacune de ses petites phrases, de ses gestes,  chaque rumeur sont autant d’éléments qui alimentent l’hypothèse de sa candidature.  DSK, ce n’est plus de la politique, c’est un feuilleton.

Les médias ne parlent pas de DSK parce que c’est un bon candidat. Il est un bon candidat essentiellement parce que les médias en parlent. La machine médiatique tourne sur elle-même. Mais dans ce feuilleton, DSK n’est pas qu’acteur mais aussi co-scénariste.  Il continue à s’exprimer dans les émissions politiques françaises, ses lieutenants jacassent ici et là… Tout un dispositif pour être candidat sans le dire tout en le disant.

Mal placé pour rassembler

La vague DSK ne s’apparente alors plus à de l’information mais à de la propagande. Dans ce tumulte, on ne parle pas ou peu de ses failles. Critique de la retraite à 60 ans, DSK est honni par une partie du PS.  Interrogé par Mediapart, le porte-parole Benoît Hamon, figure de la gauche du parti, disait à ce sujet: « Strauss-kahn fait chier ». DSK, trop recentré, est mal placé pour rassembler la gauche. Popularité médiatique ne rime pas toujours avec réussite politique.

Le dire, c’est prendre un risque. C’est sortir du journalisme moutonnier. On avait déjà jeté des fleurs à Bayrou ou Chevènement. On voit où ils en sont. Cohn-Bendit et Fillon ont eu (et auront encore), eux aussi, leurs heures de gloires médiatiques. Malgré ces pronostics douteux, la presse n’a rien retenu. DSK le sait peut-être. Il veut profiter de ce boulevard médiatique pour s’imposer. Et tant pis, s’il tombe sur une impasse.

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Le bon Fillon de la presse cire-pompes

27/03/2010 Commentaires fermés

Sarkozy s’est pris une claque. Tant pis. Les cires-pompes médiatiques ont trouvé une nouvelle idole : François Fillon.

Avec la défaite de la droite aux régionales, les mass-médias ont définitivement enterré Sarkozy. Le chef de l’Etat avait déjà connu ce trou noir début 2008 quand il était au plus bas dans les sondages. Même la presse de droite  le lâchait. Classique. L’éditocrate ne juge qu’en fonction des risques qu’il prend.  Sarkozy était au plus mal avant les élections, les résultats l’ont achevé. Pour les éditocrates, c’est plus facile de tuer quelqu’un déjà à terre.

Mais qu’on se rassure. Les cires-pompes ont déjà trouvé leur héros. J’ai nommé François Fillon. A chaque élection, un homme providentiel se pointe à la une des médias. Il y avait déjà Bayrou (lol) puis Cohn-Bendit (pas encore lol) et maintenant le Premier ministre. Peu avant les Régionales, le Point parlait déjà du « Président Fillon ». Le Monde le voit comme le nouvel homme fort de la droite, épargné par la défaite aux Régionales. Mister Nobody n’est plus.

Le syndrome « Boys band »

Et Fillon peut continuer à jubiler en silence vu ses bons sondages. Les éditocrates n’hésiteront alors plus à sortir la brosse à reluire pendant un bon bout de temps. Comme le chef de l’Etat, il tend à devenir le métronome de la vie politico-médiatique. Celui vers qui tous les regards sont tournés. Les journalistes pensent, à tort ou à raison, avoir trouvé le prochain Président. Et cherchent à éviter de se fâcher avec lui.

Une autre dérive des médias émerge alors.  Les éditocrates passent d’une allégeance à l’autre. C’est le syndrome « Boys band ». Comme des ados attardées, ils craquent pour une  star à la mode avant de la lâcher pour une autre.  Les éditocrates veillent à être toujours conformes à l’opinion en cours. Ils suivent les sondages, les commentaires de leurs confrères comme une pouffe lit les magazines de mode. Pour l’instant, Fillon est « in ». Mais jusque quand?

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Pourquoi les sondages tuent l’information

02/01/2010 6 commentaires

Les journalistes consomment à outrance des sondages. Décryptage d’une technique de désinformation.

Sonder ou informer, il faut choisir. Les médias aiment commander ou relayer des sondages sur tout et n’importe quoi. Dans l’actualité politique, ce sont bien sûr les cotes de popularité de l’exécutif qui constituent les produits phares. Et avec la fin de l’année 2009, nous avons eu le droit aux traditionnels sondages sur la personnalité de l’année. Les médias manquent d’argent pour les salaires de leurs personnels mais pas pour les instituts de sondages.

Pourtant, le contenu informatif des sondages est faible voire inexistant. Quand ils ne relèvent pas de la manipulation pure et simple. Mais pourquoi les journalistes, politiques surtout, aiment ils tant les commenter ? La 1ère raison est simple. A travers les sondages, ils ont l’impression d’avoir une « matière » fiable et objective. Ce n’est plus la peine d’enquêter, de fouiller ou d’analyser, on sonde. Une façon de sous-traiter une partie de son travail.

Relais de l’Opinion

Cette sous-traitance a une autre justification. Le journaliste cherche aussi une validation  à son discours. Comme s’il cherchait à s’excuser de ses propos. « Ce n’est pas moi qui le dit, c’est l’Opinion ! ». Son audace envers machin ou machine ne dépend plus alors de ses propres infos mais de la cote sondagière de l’intéressé(e). Il n’est plus dans l’offensive mais sur la défensive. Il n’est plus un fournisseur d’infos mais le relais des volatilités de l' »Opinion ».

Ce rôle de relais reflète un rapport pervers au public. Le journaliste ne le voit plus comme un public citoyen avide de débats ou d’infos mais comme une masse ne faisant qu’émettre des avis sur n’importe quel sujet. Avis que l’on empresse de recueillir pour mieux lui resservir. Bien sûr, le journaliste traite, voire maltraite, les résultats des sondages mais, au final, il est largement dépossédé de son rôle informatif. Et par là de journaliste.

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Sondage sur la taxe carbone : « on ne sait rien mais on dira tout ! »

04/09/2009 Commentaires fermés

66% des Français seraient contre la taxe carbone. Encore faudrait-il qu’ils sachent ce qu’est la taxe carbone.

Le débat fait rage à gauche comme à droite. Il fallait faire un sondage. TNS-Sofres s’y est collé pour Europe 1. Une étude publiée hier. Le résultat est sans appel : 2/3 des Français seraient contre la mesure.  Des chiffres relayés ici et . Dommage qu’ils ne veulent rien dire.  La faute à une sous-information des sondés. Décryptons cela.

I – Une sous-information « avouée »

Pour répondre pertinemment à une question, il faut une bonne information préalable. Surtout pour un dossier complexe comme la taxe carbone. Le site d’Europe 1 dit pourtant que « Ce rejet ne semble pas lié à un manque d’information. Bien au contraire : près de 90% des Français ont entendu parler de la taxe carbone.« . Conclusion : 90% des Français seraient bien informés sur le sujet. C’est faux.

En fait, ces 90%  (88%  plus exactement) sont composés de plusieurs strates. Les 43% de Français qui disent savoir « vaguement » ce qu’est la taxe carbone, les 13%  qui disent ne voir « pas vraiment »  ce que c’est et les 32% qui disent voir « exactement« . Mais ces trois groupes sont comptés dans ceux sensés être informés sur la question du seul fait qu’ils en aient « entendu parler« .  Sans compter les 12% qui n’en ont jamais entendu parler.

Au final, 68% des Français avouent une information faible ou nulle sur le sujet. Pour produire une opinion pertinente, il ne suffit pas d’être exposé à l’information, il faut « l’enregistrer », la comprendre. Cela peut très bien rentrer par une oreille et en sortir par une autre. Avoir entendu les noms de Tarantino ou Polanski à la machine à café ne fait pas de vous un cinéphile averti.

Sans savoir, les gens répondent malgré tout. Parce qu’ils n’ont pas envie de passer pour des abrutis complets, parce que le sondeur insiste, parce qu’ils sont bavards… Mal informés, ils peuvent parfois « attraper une perche » pour répondre. « Perches » parfois tendues par le sondeur. Ce qui peut les conduire à répondre à une toute autre question.

II – Les opposants sont plus contre la hausse de la fiscalité en général que contre la seule taxe carbone

Le sondeur sait bien que le sondé n’est pas forcément un expert du sujet. Alors il lui donne des brides d’information afin qu’il se fasse son « opinion » avec de l’interroger.

« Une commission présidée par Michel Rocard a proposé au gouvernement d’instaurer une taxe carbone : il s’agit d’une taxe qui serait prélevée aux particuliers et aux industries lorsqu’elles consomment de l’énergie (comme l’essence, le gaz, le fioul, le diesel, etc).

Par exemple, le litre d’essence serait taxé entre 4 et 8 centimes de plus à la pompe. L’argent récolté par cette taxe devrait ensuite être redistribué aux ménages les plus modestes et à ceux qui habitent en zone rurale, car ceux-ci n’ont pas forcément la possibilité de se passer de leur voiture. »

Ces informations sont très floues. On ne dit pas que l’électricité ne devrait pas être concernée. Mais rien n’a été encore décidé. La forme de la redistribution est incertaine. La ministre de l’Economie Christine Lagarde étant contre le « chèque vert » proposé par Jean-Louis Borloo (Environnement).  Les seuls chiffres concernent la taxation entre 4 et 8 centimes du litre d’essence. Du simple au double.

La seule chose de sûr, c’est qu’il y aura une taxe en plus. A partir de là, difficile d’être pour. 32% des Français se disent « totalement opposés à la mise en place de cette taxe carbone« , 34% « plutôt opposés« ,  26% « plutôt favorables » et 6% « tout à fait favorables« . 2% sont sans opinion. Mais ces chiffres concernent plus la crainte d’une hausse de la fiscalité en général que l’opposition à la seule mesure de la taxe carbone.

III – En juin, 66% des Français étaient pour la taxe carbone

Sans information préalable et en changeant l’intitulé de la question, on obtient des réponses bien différentes. LH2 avait réalisé un sondage similaire mi-juin pour la Fondation Nicolas Hulot. Fondation porteuse du projet de taxe carbone durant la campagne présidentielle. La question sur la taxe est telle (page 11, sondage sur la « population française »).

« D’après ce que vous en savez ou imaginez, êtes vous très favorable, assez favorable, assez défavorable, très  défavorable à l’idée de Contribution Climat Energie (aussi appelée taxe carbone) dont l’objectif est de permettre la réduction de la consommation d’énergie pour lutter contre les changements climatiques ? »

L’ignorant n’a pas d’information préalable. On ne sait ni qui, ni quoi sera taxé et à quelle hauteur. Il se rattrape alors à la seule « perche » à sa disposition : la taxe va permettre de « lutter contre les changements climatiques« . Un objectif louable. Sans surprise, on obtient un large soutien. 46% des Français sont « assez favorables« , 20% « très favorables » à cette idée. Mais il s’agit plus de soutien à une politique environnementale générale qu’à la seule mesure citée.

66% de soutien pour LH2/Nicolas Hulot contre 66% d’opposition pour Sofres/Europe 1. Mais avec la même sous-information. Chez LH2, 77% se disent « pas du tout »  (45%) ou « mal » (32%) informés à ce sujet. Preuve en est que l' »opinion publique », on lui fait dire ce que l’on veut. Surtout si elle n’y connaît rien.

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Sauvez une info : butez un journaliste

04/07/2009 Commentaires fermés

Best of de l’été #1. Cette semaine, le bêtisier du journalisme. Les pires cas de désinformation.

Les sondages sont un terrain miné pour les journalistes. L’intention est bonne : fournir des informations « scientifiquement » fiables. A condition d’utiliser son esprit critique. UBDP a relevé plusieurs de ces sondages basés sur du vent. Cela n’a pas empêché certains journalistes de les relayer.  Comme celui arguant que 56% des électeurs avaient fait leur choix grâce au Web aux Européennes.

Incompétence ? Peut-être. Mais parfois la religion sondagière vire au cynisme. Paris Match, en avril, avait commandé un sondage IFOP à propos des excuses de Ségolène Royal pour les propos de Nicolas Sarkozy sur l’Homme africain. Le sondage pense relever des condamnations unanimes de ces excuses. UBDP avait répondu qu’il n’en était rien. Les questions et réponses possibles étaient on-ne-peut-plus orientées.

Tuyaux percés

Le risque, ce n’est pas seulement la reprise de sondages, c’est aussi leur mauvaise analyse. Ce fut le cas avec deux sondages IFOP et CSA parus en mars. Malgré leurs résultats contradictoires, leurs données furent reprises telles quelles et assimilées par plusieurs médias. Votre serviteur avant montré que ces sondages tentaient de mesurer deux choses différentes.

Mais il y pire. Les remaniements ministériels sont toujours l’objet de rumeurs grossières. Comme celle de la nomination de Claude Allègre à l’Industrie. Finalement, il n’a rien obtenu malgré le remue-ménage journalistique sur le sujet. Les jeux de chaises musicales gouvernementaux révèlent toujours des surprises. Ils dépendent de multiples facteurs difficiles à maîtriser. A chaque fois, les journalistes se font piéger. Le public aussi.


> Tout l’été, UBDP vous propose un best of de ses articles. Chaque semaine, un thème de l’actualité est passé en revue.  D’autres surprises seront aussi au rendez-vous.

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Internet et le vote aux Européennes : le sondage crétin

19/06/2009 Commentaires fermés

Le Web, média jugé le plus « utile » pour choisir son vote aux Européennes selon l’IFOP. De la désinformation totale.

56% des électeurs  auraient trouvé Internet très utile (21%) ou assez utile (35%) pour faire leur « choix » lors des Européennes contre 50% (16 et 34%) pour la télé ou 47% (14 et 33%) pour la radio. C’est la conclusion d’un sondage IFOP rendu public hier et relayé ici et . On pourrait y voir le symbole de la « révolution numérique ». Dommage que ces chiffres soient basés sur du vent. Le sondeur et les journalistes qui l’ont repris ont fait plusieurs erreurs grossières.

I –  La forte abstention oubliée

Prétendre qu’Internet est un média puissant puisqu’il l’a influencé le scrutin est incongru. Vu que la majorité a boudé les urnes le 7 juin. 59,73% d’abstention. Un record. Si Internet peut influer sur un vote, il aurait du être assez « influent » pour inciter tout simplement à se déplacer.

II  – Un problème de méthodologie

Le sondage prétend mesurer quels médias ont influé sur le vote du 7 juin. Mais il a été réalisé les…. 3 et 4 juin. L’ensemble des électeurs n’avait pas forcément choisi une liste ou décidé d’aller voter ou non.  En outre, les questions ont été posées via un « questionnaire auto-administré en ligne » (méthode dite CAWI ou Computer Assisted Web Interviewing). En clair, un questionnaire se trouvant…  sur Internet.

Le danger est d’avoir une sur-représentation des « technophiles ». Des personnes qui ont déjà un bon rapport avec le Web.  Quand on compose un échantillon dit « représentatif », Il est difficile (voire impossible) de respecter dans le détail la composition de chaque catégorie et sous-catégorie sociale. On risque donc d’avoir trop de profs d’informatique par rapport aux profs de philo par exemple. Un biais non indiqué.

III – Des non-réponses non indiquées dans les résultats finaux

Les non-réponses ne sont pas mentionnées dans les résultats finaux. Difficile de savoir sur quoi se base les 56% qui ont trouvé le Web « utile » pour choisir leur liste. Ceux qui ne savaient pas encore ce qu’ils allaient faire le 7 juin auraient très pu « sécher » la question. De ce fait, les chiffres ne veulent rien dire.

Cette omission peut expliquer certaines contradictions. Le même sondage affirme que 60% des électeurs se sont déclaré peu (39%) ou pas du tout (21%) intéressés par la campagne. Durant celle-ci, 66% ont déclaré n’avoir jamais (49%) ou rarement (17%) « recherché des informations sur l’actualité politique sur Internet« . Les non-répondants à la question sur l’utilité des médias ont très bien pu répondre à ces questions non liées à un comportement électoral futur.

IV – Une conception erronée de l’électeur

Revenons sur l’intitulé de la question :

« Et pour faire votre choix aux élections européennes, diriez-vous que chacun des médias suivants vous a été très utile, assez utile, pas très utile ou pas utile du tout ? »

Cette conception repose sur une conception idyllique de la décision. L’électeur se baserait sur une information pure et parfaite apportées par les médias et fait ainsi un choix rationnel entre les candidats.  Choix qui se reposerait  de la même manière à chaque élection. Mais ça serait oublier les déterminants sociaux et politiques du comportement électoral.

Comme si l’électeur n’avait pas  son propre rapport à la politique, une vision du monde, ne vivait pas dans un certain contexte social, n’avait pas d’histoire familiale… Autant d’éléments préexistants qui constituent un « terreau » sociologique au comportement électoral. Le fait que les catholiques votent plutôt à droite et les athées plutôt à gauche ne peut être réduit à leur consommation médiatique à 4 jours du scrutin.

Cela ne veut pas dire que les médias ne servent absolument à rien dans un scrutin. Ils peuvent cristalliser les comportements, être instrumentalisés par les candidats et partisans. Mais ils ne peuvent être considérés comme les déterminants majeurs et a fortiori uniques du comportement électoral. Un sondage à dormir debout.

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74% des Français contre la réforme de l’hôpital : le sondage grippé

12/05/2009 Commentaires fermés

Les Français seraient majoritairement contre la réforme de l’hôpital. Mais le sondage se base sur des présupposés biaisés.

Fronde dans le milieu hospitalier contre le projet de réforme de la ministre de la Santé Roselyne Bachelot. Elle doit présenter son texte « Hôpital, patients, santé, territoires » ce mardi devant le Sénat. Un projet contesté au sein des rangs même de la majorité. Hier, Nicolas Sarkozy a fait plusieurs concessions notamment dans l’équilibre des pouvoirs entre l’équipe médicale et le directeur de l’hôpital.

Et l’opinion rejetterait ce projet. C’est l’institut BVA pour les Echos et France Info qui le dit dans un sondage rendu public aujourd’hui. 74% des Français seraient opposés à la réforme. Des chiffres repris tels quels ici et là mais aisément critiquables. Décryptage point par point.

I – Une question qui demande une bonne information préalable

Un peu de théorie d’abord. Dans les sondages, il faut distinguer les questions de comportement (« combien de fois êtes-vous allés au cinéma ces trois derniers mois ? ») et d’opinion (« Que pensez-vous de … ? »). Pour les premières, le sondé a théoriquement les informations nécessaires pour répondre sauf trou de mémoire. Pour les secondes, c’est différent. Tout le monde n’a pas forcément un avis sur tout et toutes les opinions ne se valent pas.

Il faut pour cela un « background ». Être informé sur le sujet, s’y intéresser et se sentir assez compétent pour produire une opinion « consolidée ». Il est évident qu’un débat sur le poids des médecins dans la gestion des hôpitaux ne peut pas passionner autant que le prix de l’essence ou le chômage. Des sujets moins techniques et plus concrets pour le sondé.

C’est pourtant le postulat de ce sondage qui agrège les réponses de gens qui avaient ou non un avis sur la question avant d’y répondre. Notons aussi que l’échantillon « représentatif » est censé inclure les 15-18 ans. Pour tenter de briser ce biais, le sondeur apporte un minimum d’information préalable. La question indique le principal motif de mécontentement : le renforcement des pouvoirs des directeurs d’hôpitaux.

Il y a en ce moment un mouvement de mobilisation des personnels hospitaliers et des professeurs de médecine contre la loi « Hôpital, patients, santé, territoires » qui prévoit le renforcement du pouvoir des directeurs d’hôpitaux. Vous personnellement, estimez-vous que …?

L’inégalité d’information persiste cependant. Certains sondés ne disposent que d’un seul élément d’information au sujet de loi HPST. Mais ils répondent quand même. Pour cela, ils utilisent d’autres logiques de production des opinions. Ce qui permet de comprendre les 74% d’opposition à la réforme.

II – Des opinions pas si « personnelles » : le ralliement aux « sachants »

Le sondage propose deux choix de réponses. 9% ne se prononcent pas.

  1. « Les personnels hospitaliers ont raison de s’opposer à cette loi car elle risque de privilégier la logique comptable au détriment de la logique de santé » (74%)

  2. « Les personnels hospitaliers ont tort de s’opposer à cette loi car elle permettra d’améliorer l’efficacité de nos hôpitaux »(17%)

Première remarque. La question portait sur le seul renforcement des pouvoirs des directeurs d’hôpitaux. Les réponses mettent en jeu une analyse globale sur la « logique comptable » ou « ‘l’efficacité« . D’où le renfort du biais d’information.  Le choix de réponses nécessitant plus de « munitions ». Seconde remarque, les réponses concernent l’approbation ou non de la position des hospitaliers opposés à la loi (« les personnels hospitaliers ont raison…« ). Fondamental pour la suite.

Un peu de théorie à nouveau. Dans l’analyse des opinions, il existe ce qu’on appelle des « opinions par délégation« . Pour simplifier, quand un sondé se sent incompétent sur une question mais qu’il tient à répondre pour « garder la face » notamment, il s’en remet à des « sachants » qu’il estime plus compétents et dignes de confiance. Sur la politique de santé, on se base l’avis des pontes de la médecine. Un néophyte fera confiance à son copain geek sur les questions d’informatique.

De ce fait, il est plus facile d’approuver les « personnels hospitaliers » qui défendent la « logique de santé » que de jouer les gros bras en défendant contre ces « sachants » un vague concept d »‘efficacité de nos hôpitaux« . D’où ces 74% qui agrègent des gens informés qui défendent leur propre opinion et des gens moins informés qui se rangent derrière des « sachants » qui savent de quoi ils parlent. Un chiffre composite à prendre à la légère.

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Ségolène Royal à Dakar : le sondage trompeur de Paris Match

15/04/2009 2 commentaires

Les Français désapprouveraient les propos tenus par Ségolène Royal à Dakar selon l’hebdomadaire. Intox totale.

Polémique. En déplacement lundi 6 avril à Dakar (Sénégal), L’ex-candidate PS à la présidentielle est venu demander pardon aux Africains.

« Quelqu’un est venu ici vous dire que ‘l’Homme africain n’est pas entré dans l’histoire’. Pardon, pardon pour ces paroles humiliantes et qui n’auraient jamais dû être prononcées et – je vous le dis en confidence – qui n’engagent ni la France, ni les Français »

Royal demande « pardon » pour Sarkozy

Ce « quelqu’un » c’est Nicolas Sarkozy. A Dakar, en juillet 2007, il avait prononcé un discours polémique sur le rapport de l’Afrique à l’Histoire. Discours considéré comme « raciste » par nombre d’opposants au chef de l’Etat.

« Le drame de l’Afrique, c’est que l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire. Le paysan africain, qui depuis des millénaires, vit avec les saisons, dont l’idéal de vie est d’être en harmonie avec la nature, ne connaît que l’éternel recommencement du temps rythmé par la répétition sans fin des mêmes gestes et des mêmes paroles ».

Les excuses de Royal lui ont valu une fronde à droite. Hier, a été rendu public un sondage IFOP pour Paris MatchSondage relayé par plusieurs médias. 56% des sondés pensent que ces propos « sont injustifiées de la part d’une personnalité qui n’est pas au pouvoir« . Décryptage.

I- La question ne cite pas les propos initiaux de Sarkozy

On l’a déjà dit, la question est aussi importante que les réponses obtenues. Ici, on ne rappelle pas aux enquêtés la teneur ou du moins le passage polémique du discours de Nicolas Sarkozy.

« Vous savez que, dans un discours prononcé à Dakar, Ségolène Royal a demandé «pardon» pour les paroles prononcées par Nicolas Sarkozy en 2007 qu’elle juge «humiliantes» et a ajouté que ces paroles «n’auraient jamais dû être prononcées» et «n’engagent pas la France». Selon vous, ces propos… »

Rien ne dit que le sondé sait de quoi on parle exactement. Bien sûr, il se peut que l’enquêteur ait décrit  au téléphone le discours sarkozien mais rien ne dit que tous les enquêteurs en aient donné la même version.  Bref, une question qui tient sur du vent. Dans un communiqué paru ce jour, Delphine Batho et Najat Belkacem, portes-parole de Royal, demandent l’intervention de la Commission des sondages.

II – Un choix de réponses qui ne tient pas compte du fond de la polémique

Les réponses proposées sont du même acabit. Elles se concentrent sur la forme, le fait que Ségolène Royal ne soit pas habilitée à parler au nom de la France, sur la portée internationale de ce pardon ou sur la crédibilité de l’intéressée. Rien sur le fait que les propos de Nicolas Sarkozy soient ou non jugés choquants  en eux-même et qu’ils méritaient des excuses même si la forme de la riposte (un discours à l’étranger au nom de la France) était mauvaise.

  1. Sont injustifiées de la part d’une personnalité qui n’est pas au pouvoir (Oui :  56%, Non : 43%, sans réponse : 1%)

  2. Nuisent à l’image de la France dans le monde (Oui : 45%, Non : 55%)

  3. Permettent de renforcer les liens de la France avec l’Afrique (Oui :  38%, Non : 61%, sans réponse : 1%)

  4. Renforcent sa crédibilité au niveau international (Oui : 29%, Non : 70%, sans-réponse :   1%)

Les répondants peuvent choisir plusieurs réponses. Ce qui explique que 55% des sondés pensent que les propos de Royal ne nuisent pas à l’image de la France dans le monde mais que 61% pensent qu’ils ne vont pas renforcer ses liens avec l’Afrique. Des données sans aucun sens, aucunement analysables.

III – Un sondage CSA plus mitigé

Un autre sondage nous éclaire sur la caractère trompeur du sondage IFOP/Paris Match. Dimanche, paraissait un sondage CSA pour le Parisien sur le même sujet. Cette fois la question tient compte des propos initiaux de Nicolas Sarkozy.

« En juillet 2007, le Président Sarkozy avait déclaré au Sénégal que « le drame de l’Afrique » venait du fait que « l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire ». Lors de son récent déplacement au Sénégal, Ségolène Royal a demandé pardon aux Africains pour ces propos tenus par Nicolas Sarkozy. Selon-vous, Ségolène Royal a-t-elle eu raison ou tort de faire cette déclaration ? »

Les réponses proposées se concentrent sur le pardon en lui-même au vu des propos initiaux du chef de l’Etat. Mais le sondage ne propose pas de « réponse intermédiaire ».  On peut trouver choquant le discours sarkozien mais désapprouver la forme  de la réponse. D’où le nombre important de sans-réponses (14%), donnée qui assimile les « modérés » qui ont préféré botter en touche et ceux qui n’avaient vraiment aucun avis sur la question.

  1. Elle a eu raison : 40%

  2. Elle a eu tort : 46%

  3. Sans réponse : 14%

Le sondage IFOP/Paris Match met en avant des condamnations sondagières sur la forme. Quand on se concentre sur le fond, les réponses sont plus mitigées, aucune majorité absolue ne se dégage. Sachant qu’il n’y avait pas de « réponse intermédiaire » au choix. Difficile de dire donc, au vu de ces deux sondages, si les Français condamnent ou approuvent les propos de Royal.

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