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Egypte, Tunisie… : la presse découvre que les Arabes sont des humains

30/01/2011 2 commentaires

Les mouvements en Afrique du Nord sont complexes. Trop, pour des journalistes limités au prisme occidental.

Pour nos journalistes, l’Homme arabe vient de rentrer dans l’Histoire. Après des siècles dans l’âge de pierre,  il a presque égalé notre niveau de civilisation. En témoigne la « révolution » en Tunisie contre Ben Ali ou le mouvement populaire en Egypte. Bientôt, les Arabes seront de vrais démocrates et organiseront des primaires pour 2012. On rétorquera que c’est plus compliqué, que la démocratie ne se fait pas en un jour, sans parler du rôle des islamistes. Mais allez expliquer ça à un éditorialiste de base qui doit vendre du papier.

Expliquer les mouvements en cours en Afrique du Nord est ardu et  peu commercial. Pour les pontes médiatiques, l’international est peu vendeur. Ils ont alors eu une idée : ne pas déstabiliser le lecteur, lui dire que l’étranger n’est pas si étrange. La presse ne va pas chercher chez l’autre sa complexité, des éléments liés à un certain contexte politique, économique ou sociologique mais ce qui le rapproche plus ou moins de nous. Comme si le prisme français pour ne pas dire occidental était le seul valable. Du pur ethnocentrisme.

Joffrin, ethnocentrique ?

Le choix d’un angle sur « la révolution par le Web » est typique de ce nombrilisme. Un angle déjà présent lors des manifestations du printemps 2009 en Iran. Nombre de journalistes se sont excités sur le rôle des blogs, de Twitter ou Facebook. Certes, le Net a sans doute été utile dans ces mouvements. Mais il ne constitue qu’un outil parmi d’autres, il ne dit rien des tenants et aboutissants du phénomène. Des révoltes ont existées avant Internet. Le seul intérêt de cet angle est de donner un aspect plus sexy à des évènements trop éloignés.

Le deuxième aspect est encore plus démonstratif. Il en devient même ridicule. Les mouvements d’Afrique du Nord ne seraient qu’une pâle copie d’évènements qui ont traversé l’Europe (enfin, le monde civilisé quoi). Les Arabes n’auraient fait que copier la chute du Mur de Berlin, la prise de la Bastille ou les Trois Glorieuses de 1830 (selon Joffrin). Une manière de dire que les Tunisiens sont cools mais qu’ils ont plus de 221 ans de retard sur nous. On pourrait y voir du mépris post-colonialiste ou du cynisme. Ou tout simplement de l’ignorance.

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Personne ne tient les journalistes par les couilles. Ils n’en ont pas

02/08/2010 8 commentaires

Les médias aiment crier à la censure. Mais le pire, c’est l’auto-censure.

Wikileaks a snobé les médias français. Ses récentes révélations sur la guerre en Afghanistan ont été réservées aux Ricains du New York Times, aux Rosbeefs du Guardian et aux Schleus du Spiegel mais que dalle pour mes confrères. L’ego de la profession en prend un coup. Elle se croyait toute auréolée d’indépendance avec ses scoops de l’affaire Woerth, la voilà ridiculisée à la face du monde. Le métier aurait dû s’interroger sur le sujet, le snobisme de Wikileaks posant une vraie question de fond.

On pourrait croire que la mauvaise réputation journalistique de la France vient de l’influence de ses cercles de pouvoir. La réforme de l’audiovisuel public ou les attaques de l’UMP contre Médiapart ont fait craindre une reprise en main politique des médias. Une crainte partagée au delà de la corporation. La solidarité envers Médiapart ou Porte et Guillon l’a montré. Les journalistes refusent les pressions éditoriales venues de l’extérieur. Pour préserver leur liberté, ils veulent se protéger des autres.

Le journaliste, pire ennemi du journalisme

Erreur, qu’ils cherchent d’abord à se protéger d’eux-mêmes. Qu’ils cessent de se défausser sur l’Elysée ou leurs actionnaires pour justifier leur propres failles. La dernière interview cire-pompes du chef de l’Etat par Pujadas ne peut s’expliquer par la seule mainmise de l’Elysée sur l’audiovisuel public. C’est aussi une question de compétence. L’effet d’une pseudo-culture journalistique où l’on parle de presque tout alors qu’on ne sait vraiment rien. Une loi pour les journalistes peut protéger les sources pas les neurones.

Tout est affaire d’éthique professionnelle. Le pire ennemi du journalisme, c’est le journaliste lui-même. A voir ce que font certains de leur liberté d’expression, il y a de quoi avoir envie de rétablir la censure. La polémique stérile, l’uniformisation éditoriale, le mépris du public sont des menaces pires que les pressions sarkoziennes. La relation entre pouvoir et médias n’est pas sadique, elle est masochiste. Quand les journalistes ne sont pas fouettés, ils se mettent eux-même une muselière. Et ils aiment ça apparemment.

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La crise de la presse est politique pas technologique

07/07/2010 1 commentaire

Le journalisme trouvera son salut par ses contenus et non ses contenants.

L’iPad, dernière bouée de sauvetage d’une presse en crise ? Les patrons de médias s’extasient sur ce gadget technologique censé faire revenir les lecteurs et accessoirement les bénéfices. Ce n’est pas totalement vain. Les usages des médias changent, autant s’y adapter. Il ne s’agit pas de jouer les réacs. Mais attendre d’Apple ou Google des solutions pour sauver la presse est flippant. On s’abandonne aux règles du business pur et dur. On ne fait plus du journalisme mais du commerce.

La technologie en général et le Web en particulier ne sont ni les causes ni les (seuls) remèdes à la crise de la presse. C’est avant tout un problème de fond. La presse est malade de ses journalistes. De  leur mépris pour le peuple, de leur paresse intellectuelle, de leur corporatisme, de leurs lubies et dogmes… Rien de nouveau. Mais le dire, c’est parler dans le vent. Pour les pseudos-penseurs de la crise médiatique, tout est problème de contenant et pas de contenus, de modèle économique et pas éditorial.

Le cas Mediapart

Informer n’est pas une question technologique mais politique. Pas au sens droite contre gauche mais au sens du service du bien commun. C’est une question de conception du monde, c’est tout bonnement défendre le droit aux gens à ne pas mourir idiots. Avant de faire de beaux discours sur les supports, ce sont ces principes qu’il faut défendre. La période y est propice. En pleine affaire Woerth/Bettencourt, le rôle des journalistes sera essentiel. Reste à savoir s’ils feront du tapage ou de l’info.

Dans cette tourmente, Mediapart, qui a débusqué l’affaire, marque des points. Le site a remporté un beau succès, d’estime pour l’instant. Bien sûr, ça ne veut pas dire que tout est parfait et que le médiacrate Plenel est un génie. Mais face à la soupe actuelle, le cas Mediapart est un sujet de réflexion pour une presse qui enquête, dérange, qualitative et pas quantitative. Le tout est de montrer que c’est par ses contenus et les valeurs de ses journalistes que la presse trouvera son salut. La vraie révolution est là.

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Les journalistes sont (déjà) des robots

22/05/2010 Commentaires fermés

L’information ne peut se limiter au temps court. Le risque est de s’enfermer dans le formatage.

C’est devenu le dogme de nombreux médias. Être les premiers sur l’info. Nous ne sommes plus dans le domaine du qualitatif mais du quantitatif. L’info n’est alors plus du débat, du questionnement mais de la polémique, de l’évènement. Que l’on parle de Zahia, des apparts d’Estrosi ou de la fameuse « rumeur ». L’info est rapidement traitée puis oubliée, on gonfle et on dégonfle des bulles, sans recul ni perspective.

La réactivité peut être une bonne chose. Le but de l’info est de dire ce qu’il se passe, où, quand et avec qui.  Les nouvelles technologies avec le Web, les iPhones permettent d’être informés partout et en temps réel. Mais le journalisme ne peut se limiter à ça. Ce qui nous pend au nez, c’est logique du « fast-food ».  On informe partout de la même manière même avec du bas de gamme, le tout étant de livrer au plus vite le produit.

Le journalisme « fast-food »

Le piège majeur, c’est la technicisation de l’info.  L’idée que les journalistes soient remplacés par des robots a fait rigoler. C’est pourtant déjà le cas. La course à l’info a produit des journalistes humanoïdes sans âme ni conscience. Le formatage devient légion, le doute et l’originalité sont à bannir. Le point ultime, les chaînes télés et sites d’info en continu qui deviennent des usines de poulets en batteries recrachant au plus vite l’AFP.

Pourtant, le journalisme se joue aussi sur le temps long. Enterrer une polémique pour passer à une autre n’est pas viable. Il faut imposer un droit de suite. L’info a aussi besoin d’enquête, d’analyse et de débat. Le problème est que ça nécessite des moyens humains et intellectuels. Mais le (très) court terme est sans doute plus séduisant pour les patrons de presse. Le temps long n’est pas apte à rassurer leurs actionnaires. C’est pourtant un pari à prendre.

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Jean-Jacques Bourdin ou le journalisme bouffon

11/11/2009 6 commentaires

L’intervieweur phare de RMC aime poser des questions-pièges aux politiques. Dommage qu’il se limite au rôle d’amuseur public.

Chrisitian Estrosi, ministre de l’Industrie, ne connaît pas le prix du timbre. L’« information » fait le tour du Web depuis hier. Invité sur RMC, Estrosi n’a pas su répondre correctement à Jean-Jacques Bourdin. Ce dernier avait déjà piégé Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy sur le nombre de sous-marins nucléaires d’attaque et Frédéric Lefebvre, porte-parole de l’UMP, sur la définition du web 2.0.

Tout le monde applaudit. La France se réjouit d’avoir des journalistes aussi audacieux. Elle ne devrait pas pourtant. Bourdin excelle plus dans la bouffonerie que dans l’information. Il amuse, fait le buzz mais rien de plus pour éclairer le citoyen. Bourdin en ressort quand même gagnant. Dans un univers journalistique de plus en plus consensuel et sclérosé, il en faut peu pour passer pour le trublion de service.

La défaite de l’information

Son style pose toutefois problème. Bourdin débarrasse la politique de toute dimension idéologique, de pouvoir pour la ramener à une finale de « Questions pour un champion ». Peu importe si la Poste sera ou non privatisée, le plus grave est qu’Estrosi ne sache pas le prix du timbre. Au fond, le ministre perd peu dans cette histoire. Mieux veut passer pour un idiot sur la Toile que pour un malhonnête face aux élus et aux salariés de la Poste.

La contestation du récit de Nicolas Sarkozy sur « sa » chute du Mur de Berlin relève de la même logique. On en fait une affaire d’Etat alors que tout cela ne prête qu’à rire. « Enquêter » sur la véracité des dires présidentiels devient un prétexte pour justifier sa carte de presse alors que d’autres mensonges sont passés sous  silence. Le style Bourdin, les sujets sur le Mur sarkozien n’ont en fait qu’une seule fonction : masquer la défaite de l’information.

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Internet n’est qu’une mise en scène de la nature humaine

11/10/2009 8 commentaires

Le Web est souvent stigmatisé pour ses trolls et autres sites orduriers. Mais la connerie humaine n’est pas née sur la Toile.

Abordez un sujet sensible sur la Toile et c’est la déferlante dans les commentaires. Pédophilie, religion, extrême-droite… Autant de thèmes qui attirent les trolls en tous genres. Votre serviteur en a fait l’expérience. Bien sûr, il existe des gens qui répondent et critiquent constructivement. Mais ils sont noyés dans la masse, pris dans une « flame war » qui dépasse les limites du supportable. Rien qui ne donne envie de débattre sereinement.

Internet est traversé par un cruel dilemme. Sa logique de partage et de débat est à la fois son meilleur atout et son pire défaut. La plus grande menace contre Internet, ce n’est pas Hadopi ou Denis Olivennes, directeur du Nouvel Obs, mais Internet lui-même. S’y expriment tant de belles plumes qu’une « débilosphère » qui érige l’insulte ordurière en sport national. « Débilosphère » qui tend à devenir la seule chose à retenir du Net pour certains.

Débilosphère

Une analyse trop simpliste. Internet n’a pas inventé la connerie humaine. Le racisme, l’injure existaient bien avant. Ils obtiennent juste une  nouvelle tribune. Il en reste que les côtés les plus sombres de l’humanité y trouvent un écho plus important que dans « la vie réelle ». La croyance en un anonymat théorique, la possibilité de s’adresser à un large public amplifiant la voix de ceux qui pensent pouvoir dire tout et (surtout) n’importe quoi en toute impunité.

Mais tout cela n’est qu’une mise en scène. Et c’est une adaptation, pas une création originale. L’adaptation d’une œuvre  très ancienne : la nature humaine.  Ce n’est pas une copie exacte mais on n’invente rien à la base. Le Net est une chose complexe. Complexité qui n’est qu’un reflet légèrement déformé de la complexité humaine. Internet n’existe pas en lui-même, ce n’est qu’un moyen. C’est à ses usagers d’en faire ce qu’ils veulent. Pour le meilleur et pour le pire.

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Les petits forçats du journalisme

13/08/2009 1 commentaire

Best of de l’été #5. Journaliste, une profession qui fait rêver certains. Elle a pourtant besoin d’une (auto)-critique radicale.

« Suivre l’actualité ». C’est le credo de nombreux journalistes. L’actualité, elle existe ex nihilo.  Elle s’impose au journaliste et à ses confrères. Elle a son propre “agenda” qui dicte ses rendez-vous et ses évènements. C’est un flux contraignant, le lit d’un fleuve dont on n’imagine même pas sortir et sans lequel on est perdu. Au risque d’uniformiser l’information. Et de perdre tout recul sur son travail.

Du recul, le journalisme en a pourtant besoin.  L’auto-critique reste encore difficile. En témoigne la pseudo-polémique des « forçats de l’info » autour d’un article paru dans le Monde du 25 mai. Il traitait des conditions de travail des journalistes web avec salaires et info au rabais. Fronde des intéressés. Ils dénoncèrent un article caricatural voire mensonger. Une indignation sélective. Comme si c’était la première fois qu’un journaliste racontait des âneries.

Questions de fond

Web contre presse « papier », l’affrontement est stérile. Ce qui compte, ce n’est pas la forme mais le fond. Le rôle social que doit jouer le journaliste, quelque soit son support.  Le Net a bien sûr ses avantages comme une participation des lecteurs facilitée (commentaires…). Mais il ne suffit pas de se demander ce que le lecteur peut apporter au journaliste. Il faut aussi se demander ce que le journaliste peut apporter au lecteur.

C’est là que ça se corse. Le journaliste s’est cru une bonne fois pour toute « vigie de la démocratie ». La carte de presse confiant ce statut ad vitam aeternam. Vaste erreur. Incompétences, soumission à la communication présidentielle… Les exemples ne manquent pas. Pour qui veut rentrer dans le métier (dont l’auteur de ces lignes), il y a de quoi être pessimiste. A éviter toute réflexion sur le fond, les journalistes vont finir par le toucher.


> Durant tout l’été, UBDP vous propose un « best of » de ses articles. Chaque semaine (ou presque), un thème de l’actualité est passé en revue.

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Internet et le vote aux Européennes : le sondage crétin

19/06/2009 Commentaires fermés

Le Web, média jugé le plus « utile » pour choisir son vote aux Européennes selon l’IFOP. De la désinformation totale.

56% des électeurs  auraient trouvé Internet très utile (21%) ou assez utile (35%) pour faire leur « choix » lors des Européennes contre 50% (16 et 34%) pour la télé ou 47% (14 et 33%) pour la radio. C’est la conclusion d’un sondage IFOP rendu public hier et relayé ici et . On pourrait y voir le symbole de la « révolution numérique ». Dommage que ces chiffres soient basés sur du vent. Le sondeur et les journalistes qui l’ont repris ont fait plusieurs erreurs grossières.

I –  La forte abstention oubliée

Prétendre qu’Internet est un média puissant puisqu’il l’a influencé le scrutin est incongru. Vu que la majorité a boudé les urnes le 7 juin. 59,73% d’abstention. Un record. Si Internet peut influer sur un vote, il aurait du être assez « influent » pour inciter tout simplement à se déplacer.

II  – Un problème de méthodologie

Le sondage prétend mesurer quels médias ont influé sur le vote du 7 juin. Mais il a été réalisé les…. 3 et 4 juin. L’ensemble des électeurs n’avait pas forcément choisi une liste ou décidé d’aller voter ou non.  En outre, les questions ont été posées via un « questionnaire auto-administré en ligne » (méthode dite CAWI ou Computer Assisted Web Interviewing). En clair, un questionnaire se trouvant…  sur Internet.

Le danger est d’avoir une sur-représentation des « technophiles ». Des personnes qui ont déjà un bon rapport avec le Web.  Quand on compose un échantillon dit « représentatif », Il est difficile (voire impossible) de respecter dans le détail la composition de chaque catégorie et sous-catégorie sociale. On risque donc d’avoir trop de profs d’informatique par rapport aux profs de philo par exemple. Un biais non indiqué.

III – Des non-réponses non indiquées dans les résultats finaux

Les non-réponses ne sont pas mentionnées dans les résultats finaux. Difficile de savoir sur quoi se base les 56% qui ont trouvé le Web « utile » pour choisir leur liste. Ceux qui ne savaient pas encore ce qu’ils allaient faire le 7 juin auraient très pu « sécher » la question. De ce fait, les chiffres ne veulent rien dire.

Cette omission peut expliquer certaines contradictions. Le même sondage affirme que 60% des électeurs se sont déclaré peu (39%) ou pas du tout (21%) intéressés par la campagne. Durant celle-ci, 66% ont déclaré n’avoir jamais (49%) ou rarement (17%) « recherché des informations sur l’actualité politique sur Internet« . Les non-répondants à la question sur l’utilité des médias ont très bien pu répondre à ces questions non liées à un comportement électoral futur.

IV – Une conception erronée de l’électeur

Revenons sur l’intitulé de la question :

« Et pour faire votre choix aux élections européennes, diriez-vous que chacun des médias suivants vous a été très utile, assez utile, pas très utile ou pas utile du tout ? »

Cette conception repose sur une conception idyllique de la décision. L’électeur se baserait sur une information pure et parfaite apportées par les médias et fait ainsi un choix rationnel entre les candidats.  Choix qui se reposerait  de la même manière à chaque élection. Mais ça serait oublier les déterminants sociaux et politiques du comportement électoral.

Comme si l’électeur n’avait pas  son propre rapport à la politique, une vision du monde, ne vivait pas dans un certain contexte social, n’avait pas d’histoire familiale… Autant d’éléments préexistants qui constituent un « terreau » sociologique au comportement électoral. Le fait que les catholiques votent plutôt à droite et les athées plutôt à gauche ne peut être réduit à leur consommation médiatique à 4 jours du scrutin.

Cela ne veut pas dire que les médias ne servent absolument à rien dans un scrutin. Ils peuvent cristalliser les comportements, être instrumentalisés par les candidats et partisans. Mais ils ne peuvent être considérés comme les déterminants majeurs et a fortiori uniques du comportement électoral. Un sondage à dormir debout.

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Journalisme : le nombrilisme des « forçats de l’info »

05/06/2009 1 commentaire

Les journalistes web se rebellent. Pas pour défendre le rôle social de l’information mais leur propre ego numérique.

Branle-bas de combat sur Internet. Dans Le Monde du 25 mai, Xavier Ternisien publiait un article intitulé « Les forçats de l’info« . Il traite de la précarité des journalistes web. Au taquet, petites mains et grosses huiles de la Toile clashent Ternisien. Ils dénoncent un mépris de leur métier. Un résumé des algarades est paru dans le Libé de ce jour et sur Rue89 le 28 mai. Arrêtsurimages.net s’est aussi penché sur le sujet ce vendredi. Votre serviteur l’avait évoqué dès le 25.

La rébellion fait du buzz. Difficile quand on vogue plus ou moins dans le milieu journalistique de ne pas en entendre parler. On pourrait s’en féliciter. Une « conscience de classe » émerge chez les journalistes web. Quand un journal « papier » s’éteint, un site web s’éveille. La nouvelle génération est en marche. Que nenni. Loin d’être le début du renouveau journalistique, cette simili-révolte est avant tout le symbole d’une dérive nombriliste de la profession.

Indignation sélective

Parler de  « conscience de classe » pour les seuls journalistes web est une  impasse. S’il doit y avoir une « conscience de classe » journalistique, elle doit être partagée au delà du support. Elle doit se définir non pas par une technique ou un savoir-faire mais par un savoir-être. La volonté de servir honnêtement et pertinemment le débat public. Internet ne sauvera pas (à lui seul) le journalisme. Une réflexion sur son rôle social, oui. Mais à défaut de savoir parler des autres, les journalistes aiment parler d’eux-mêmes.

Des âneries, des énormités, il y en a tous les jours dans la presse ou les JT. Et pas que sur les journalistes Web. Attendre l’article de Ternisien pour faire de la critique massive des médias est ridicule. La capacité d’indignation de nos « forçats » est sélective. S’il faut une révolte numérique, penchons-nous plutôt sur le traitement racoleur et vide d’infos de la disparition du vol AF447. Sauf si on place l’honneur de son ego avant celui du public.  Quand Albert Londres portait « la plume dans la plaie », ses enfants se la mettent dans le cul.

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Journalistes précaires, précarité du journalisme

25/05/2009 Commentaires fermés

La précarité de l’emploi frappe les journalistes. Mais c’est la précarité intellectuelle qui les menace le plus.

« O.S de l’info« . Après cinq ans de fac, un concours sélectif et deux ans en école, c’est le sort qui attend de nombreux jeunes journalistes (dont votre serviteur). Bakchich.info en octobre dernier, Télérama en février se sont penchés sur cette question de la précarité journalistique. Le Monde de ce lundi également, une petite controverse en prime avec Eric Mettout, rédacteur en chef de L’Express.fr. Le constat est le même :  conditions de travail difficiles, salaires minables, info au rabais… Le règne du « low cost ».

Scandale ! Un journaliste, une « vigie de la démocratie », presque aussi mal payé (quand on le paye) qu’une femme de ménage  ! On pourrait s’indigner. Faire une grève de la faim. On peut aussi garder la tête froide. Vendredi, E24.fr relayait les propos d’un spécialiste de l’économie des médias lors d’une conférence à l’université d’Oxford. « Les salaires reflètent la valeur produite. Et les journalistes, ces jours-ci, ne créent plus vraiment de valeur« . Provocant mais essentiel pour la suite.

Nombrilisme

La justification du salaire peut poser problème. Quand les jeunes compilent de l’AFP, leurs aînés font la une de l’Express sur « la tentation de l’infidélité« . Au delà du statut, on relaie des rumeurs, des sondages fantasques, on se laisse intoxiquer par le pouvoir. La stabilité n’améliore pas forcément la qualité de l’info, qu’on soit vissé  à son bureau ou accrédité à l’Elysée. Le 1er scandale, ce ne sont les précaires payés au lance-pierre, ce sont les « installés »  grassement payés au vu de la teneur de leurs productions.

Le problème de fond, c’est la précarité intellectuelle du journalisme. Réclamer du temps et des moyens, c’est légitime. Reste à savoir ce qu’on fera de ce temps et de ces moyens. Toute réflexion sur le statut matériel des journalistes doit s’accompagner d’une réflexion sur leur rôle social : fournir une information juste, originale et pertinente. Sinon, on tombe dans le corporatisme le plus bas de gamme. De « vigie de la démocratie », le journaliste devient alors une vigie de son propre nombril.

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