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Brûler TF1 et Elkabbach ? Brûlons plutôt le journalisme

01/10/2010

OK, TF1, c’est caca. Mais la crise de la presse est la crise d’une profession pas d’une chaîne.

Montebourg attaque TF1. Le député PS a écrit hier une lettre bien sentie à Nonce Paolini, PDG de la chaîne. Paolini lui reprochait des propos tenus dans un film de Pierre Carles, alors que Montebourg se croyait « en off ». Dans sa missive, le socialo dénonce les liens entre la chaîne et le pouvoir et l’accuse de transmettre les valeurs « de l’argent, de la cupidité et de la compétition acharnée ». Pas faux. Mais si Montebourg veut dénoncer ce qui pourrit les médias en général et le journalisme en particulier, qu’il choisisse mieux sa cible.

TF1 n’est pas le problème. Ni même Elkabbach, qui avait jugé Montebourg (encore lui) « moins intéressant » que Christine Lagarde. Le problème, c’est une conception générale du journalisme. TF1 est déjà discréditée, mieux vaut se pencher sur les pseudos-impertinents. Notamment ceux du groupe Canal+, que ce soit à travers l’info fast-food de I>Télé ou le show décérébré du Grand Journal. Mais nul ne doute que Canal constitue un meilleur modèle pour les jeunes journalistes que Jean-Pierre Pernaut. Tant pis s’ils servent la même soupe.

Pire que TF1 : Canal+

Changer une chaîne ne suffira pour sauver le journalisme. Ce sont des logiques de fond qui sont en cause : l’évènement à tout prix, le suivisme, l’auto-censure… Logiques qui pèsent sur tous les médias. Quand TF1 met le paquet sur la sécurité, elle ne fait que suivre un mouvement médiatique général derrière l’agenda de l’Elysée. Tout ça pour être « dans l’actu », suivre « ce qui est chaud ». D’autres médias font de même et les reprises s’enchaînent. TF1 ne fait qu’appliquer, avec zèle sûrement, ces dogmes qui minent le journalisme.

Bien sûr, il y a des choses à dire sur TF1. Mais la chaîne ne peut être l’arbre qui cache la forêt, un bouc émissaire qui permettra de dire que tout va bien une fois éliminé. La crise du journalisme, ce n’est pas à cause du manque de kiosques à journaux, c’est une crise morale et même politique. La chasse au Paolini ne doit pas empêcher une profonde autocritique. Par corporatisme, la profession a toujours voulu l’éviter, préférant désigner des cibles. TF1 ou Elkabbach sont sans doute des brebis galeuses. Mais la gale, c’est contagieux.

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  1. 02/10/2010 à 09:46

    TF1 est au média ce que l’UMP et à la politique, Canal+ c’est plus soft, PS. Mais au fond, la direction est pas très différente, c’est juste plus direct.

    • 02/10/2010 à 11:48

      C’est bien le problème. Mais pourtant Canal+ bénéficie d’une meilleure image. On désigne un ennemi sans voir les hypocrites autour.

  2. Jo l'indien
    04/10/2010 à 13:18

    Qu’à moitié d’accord avec cet article.
    S’attaquer aux « pseudo-impertinents » (canal+), oui ! Ainsi qu’aux « logiques de fond », re-oui.
    Sauf que…sauf que……..pour s’attaquer aux logiques de fond, briser (nationaliser) TF1 est un passage obligatoire. C’est bien cette chaîne qui tirent les chaînes publiques à la course à l’audimat, aux faits- divers, à l’information rapide et sensationnaliste, sans parler des séries et émissions plus débilisantes et racoleuses les unes que les autres, etc….Impossible pour un secteur publique de ne pas s’aligner sur le rythme de son concurrent ! Sinon on en comprendrait pas comment ce secteur publique a pu perdre autant de consistance en si peu de temps (deux ou trois dizaines d’années). Ex: dans l’audiovisuel, concernant l’insécurité, TF1 a imprimé le rythme (d’ailleurs, la proximité de TF1 et des politiques au pouvoir fait qu’elle n’a pas suivi le Monde ou Libération mais bien plutôt cet agenda politique dont vous parlez), et un rythme soutenu.
    Quant à l’appel à la morale et à l’autocritique, c’est asez ridicule. Surtout quand on vient de parler de logique de fond : soit ces logiques sont contraignantes et alors tous les appels à la morale ne sont faits que pour essayer de se donner une crédibilité perdue et un esprit de pseudo résistance ; soit elles n’existent pas et alors pourquoi en parler ?

    • 04/10/2010 à 13:51

      On peut aussi essayer (ou croire) qu’on peut soit-même briser ces logiques mais on rentrerait alors dans un grand débat sociologique….

  3. Jo l'indien
    04/10/2010 à 14:19

    Oui, grand débat bien nécessaire, non ? Mon point de vue : puisque qu’essayer de briser ces logiques c’est d’abord en prendre conscience, ces logiques-mêmes permettent-elles cette prise de conscience ? En d’autres termes, lorsque les journalistes viennent souvent du même milieu, travaillent pour des personnes qui sont, pour le coup, du même milieu et pensent souvent à l’identique, quand ils doivent bosser dans l’urgence pour un salaire assez moyen au regard de leurs ambitions et/ou des factures qui tombent, quand autour d’eux le fonctionnement journalisitique fonctionne en ne laissant presque aucune voix à une voix un peu dissonante, etc…etc…combien auront le temps, l’énergie, l’envie et la force de briser ces logiques. Bref ! Travailler sur ces logiques, càd créer les conditions favorables à un travail journalistique correct, me paraît plus réaliste qu’un appelle à la morale individuelle qui, entendu par 10% sera suivi par 1 pour mille, et restera vain….

    • 04/10/2010 à 16:56

      Je suis plus optimiste, un pour mille, c’est déjà pas mal… un pour mille qui en convaincra ensuite deux et etc….

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